La folie des glandeurs

Les Pyramides de Loncin

Suite à mes précédents papiers, on me résume ainsi : trop sérieux, pas assez rigolo, défaitiste, désespéré, parfois triste …

Ahaah, voilà comment certains me jugent ? Ahaah voilà ce que l’on pense de moi ? Eh bien, paf ! Les pyramides de Loncin, voilà ma réponse.

Loncin et ses mystères…

Restées longtemps pour les savants une énigme insondable, les pyramides inverses de Loncin s’édifient tout d’abord comme les fixe-chaussettes d’un faussaire.

Voici déjà un préambule désopilant.

Mais commençons par le début et, dans la foulée, terminons par la fin.

Avec ses 3194 habitants, Loncin, cette ancienne capitale de l’empire wallon est située non loin d’un fleuve. Enclave étrangère au départ, elle n’était, à l’aube des temps, qu’un hameau peuplé de mammouths ventriloques dépendant de la riche cité d’Awans.

Étymologiquement, Loncin (pour être tout à fait exact, je devrais dire : « Hon Hin », puisque les consonnes n’étaient pas prononcées dans les cinglyphes) est tout simplement la transcription phonétique de « long sein », un surnom donné à une puissante reine de la Ière dynastie, portant (avec sang-froid) le nom de Klaxhâbe, et unanimement présumée être à l’origine de la première pyramide inverse.

Un thorax migre, des jambes boursouflées, Klaxhâbe était très grande. Elle mesurait 1m98 alors que la moyenne des Loncinois était 1m55. Elle portait une sorte de coussin noué sur son front, car il n’était pas rare qu’elle se heurte aux linteaux des portes. Elle avait les cheveux d’une couleur rouille, consécutive à l’usage intensif, à sa toilette, de l’eau ferrugineuse de Spa.

On n’en sait pas beaucoup plus sur cette mystérieuse reine  et sur son étrange (et presque monstrueux) physique. Était-elle malade ? On soupçonne chez elle le syndrome de Baraquer-Simons : c’est-à-dire une lipodystrophie d’étiologie inconnue qui lui donnait cet aspect si singulier.

On a retrouvé, dans son tombeau,  des jarres contenant du genièvre ; et pas n’importe lequel : du genièvre millésimé. Elles portaient le nom du bouilleur de cru, l’année de sa fabrication et la région de sa provenance.

Le plus étrange est que ces cruchons nous soient parvenus intacts, car la reine avait une réputation d’ivrogne invétérée.

En 1921, le loncinologue George Herbert Carnaval a exhumé le palais royal.

À l’endroit où se trouvaient les lieux d’aisance (les latrines si vous préférez), il a retrouvé par miracle une toge souillée, supposée appartenir à la souveraine. Une datation a révélé qu’il s’agissait bien d’un étron riche en carbone excrété par la reine elle-même.

En 1957, soit plus de 30 ans plus tard, le couturier Bouillotte, un medium visionnaire, a clairement vu son fantôme se rendre aux lieux.

Mais revenons-en aux pyramides.

On ne sait malheureusement pas dater avec exactitude l’érection des géantes de Loncin. La prouesse technique prodigieuse qu’elles sous-entendent (les pyramides de Loncin sont construites à l’envers, épousant les vallées de manière à créer, en apparence, un sol uni et plat) étonne l’ensemble du  monde scientifique. Il est important de noter, qu’à l’heure actuelle, on ne sait toujours rien des procédés de construction de ces colosses, élevés, semble-t-il, à l’aide d’outils principalement constitués de bois, de houille et de charbon. Énormément de néo-archéologues, friands d’explications délirantes, échafaudent les théories les plus hétéroclites.

La Loncinologie a pourtant exécuté plusieurs pas de géant au cours du fantastique « grand-mère que veux-tu ? » du 21ème siècle, et la coloration magique des cinglyphes, au passé lointain, lui a permis de survivre aux quolibets d’une foule haineuse et incrédule.

Lorsque l’on prend la peine et (surtout) le temps de les traduire, on réalise que ces textes vénérables indiquaient aux contemporains à qui ils devaient impérieusement obéir : les Archirix ; et les lois auxquelles ils devaient se conformer pour atteindre la perpétuité.

Cette croyance était symbolisée par le lombric qui, une fois sectionné, continue à vivre… sous la forme de deux individus !

Cette conviction post-mortem schizoïde peut nous paraître candide (je dis « candide » car je ne désire pas verser dans la grossièreté) mais il ne faut en aucun cas minimiser sa force : les Archirix portaient sur leur tiare de bakélite l’image d’un ver de terre dressé !

Les momies, créées naturellement par la structure particulière du sol de Loncin (riche en  quartz, en coquilles d’escargots et en squelettes de coraux), étaient coupées en deux une fois sèches ; ce qui, par une extension biomimétique, rejoignait tout naturellement le mythe des lombriciens.

Sectionnés par le milieu, les défunts présentaient donc une « partie haute » et une « partie basse », le pesage de celles-ci décidait alors si on allait se réincarner en humain ou en animal.

Voilà, chers lecteurs, un peu de gaieté et d’espoir.

La vie dans l’au-delà dominait l’appréhension universelle naïve des Loncinois. Ils ne songeaient qu’à elle, et ont été capables, en son nom, de construire ces ouvrages qui, encore de nos jours, insufflent un sens à notre existence et aux déambulations souvent irraisonnées de nos carcasses.

Tous ces gens-là sont morts à présent, et il va falloir nous résoudre à vivre avec les modernes.

En attendant (comme Simon avec son bâton), scandons cette farandole joyeuse qui nous transcende :

Bonsoir, Marie Claq’ Sabot,
Trossez bin vos’ cotte
Quand vos îrez …. youp la la.
Bonsoir, Marie Claq’ Sabot,
Trossez bin vos’ cotte,
Quand vos îrez cô !

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Georgie de Saint-Maur

2 réflexions sur “Les Pyramides de Loncin

  • Jean-Luc Dalcq

    On a raconté effectivement beaucoup de choses au sujet de ce loncinologue Herbert George Carnaval dès les années 20. Des choses aussi étranges que teintées des plus extravagants mystères qu’une contrée puisse receler au sein de sa vallée. Et ce, de l’ubac à l’adret. Le sieur qui avait effectivement retrouvé en 1921 une jarre d’un genièvre millésimé datant bien de cette reine Klaxâbe, après pointilleuses analyses, dut bien convenir qu’il s’agissait purement et simplement du Pequet dit des “vî Oyeux” (c’est à dire les anciens “bien entendants”, autrement dit les vioques ayant conservé quasi l’oreille absolue), plus simplement encore appelé “peket de Liège”.

    Il existe d’ailleurs aujourd’hui, face à la Violette, rue de l’épée à Liège, la “Maison du peket” pour rendre hommage à cette époque dans un éventail de pekets de toutes couleurs et saveurs que lui envie le reste du monde.

    Et pour la petite histoire, je suis sorti un jour avec une loncienne pure souche. Et son anatomie avait pour particularité de trimballer effectivement par devant elle une paire de seins qui à ce stade, sans le moins du monde vexer l’intéressée qui s’en flattait plutôt, pouvait être qualifiée de “loches”.

    Je pense que ces magnifiques roberts, à la fois aussi longs que larges (lorsqu’on les voyait passer à travers l’embrasure d’une porte, la cantonade ne pouvait s’empêcher de penser ” Ah, Angèle, c’était son nom, ne va pas tarder…”)ont permis à mes délires imaginaires et godesques les plus beaux et les plus lointains voyages tout en la pelotant comme un malade sur place. Ces cinépimasties de velours répétées à tendances éruptives (dans l’échafaudage du résultat souvent laiteux) ont fixé en moi pour l’éternité l’amour des pyramides et de l’Egypte antique.
    Nom d’un sein glyphe, bordel!

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    • Parlons d’abord de cet alcool de grain, aromatisé à l’aide de “pèkes” (baies de genévrier) connu et apprécié de Namur à Maastricht.
      La ville de Maastricht, le “méandre de la Meuse” (het richting van het Maas) n’est pas uniquement connue pour cet alcool, mais on sait l’y apprécier à sa juste valeur. C’est d’ailleurs à Sint-Pietersberg (la Montagne Saint-Pierre) sorte de de petit talus qui, dans ce plat pays, fait figure d’Everest, que fut intronisée Klaxhâbe, dans un concert enthousiaste de libations et de claquements de sabots.
      Je vous remercie, cher Jean-Luc, d’avoir lu cet article et surtout d’avoir évoqué, en termes choisis, cette particularité anatomique qui fait la fierté de bien de Loncinoises.
      Vous êtes, en général, un lecteur avisé, dont les précieuses interventions révèlent des précisions pertinentes, où se mêlent bien souvent de piquantes expressions et des jurons de la pire espèce.
      Merci.

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